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Juliette { My American Graffiti

Juliette Age : 30

Juliette


Juliette { My American Graffiti Empty
message posté le Sam 10 Mar 2012 - 16:39 dans Juliette { My American Graffiti
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I- 1, 2, 3, viens donc avec moi.

    Prénom : Juliette
    Âge : 16 ans
    Origines : Américaines
    Arrivée : 23 novembre 1960
    Manie, habitude : Parfois elle tapote la pointe de son pied droit sur le sol, sans même s'en rendre compte.
    Marque : Œil gauche - Flamme
    Groupe : Bleu



II- 4, 5, 6, je suis ta hantise.

    Juliette est les yeux du monde. Lorsque son regard bleu comme l'Océan se pose sur vous, c'est comme si elle pouvait lire en vous, voir le moindre de vos secrets. Ces deux pupilles glaciales sont les premières choses qu'on remarque de sa personne, peut-être parce qu'elles en sont l'unique source de couleur. On dit que le bleu est la couleur qui demande le plus d'énergie à produire à la nature, c'est sûrement pour cela que sa peau est si pâle, si fragile, et ses cheveux aussi noirs que l'encre de chine. Juliette attire l'attention, mais elle n'aime pas les regards posés sur elle, ils lui font peur. Ce sont des regards qui blessent, comme des milliers de couteaux plantés sur son corps maigre, alors Juliette ferme les yeux, et on ne la voit plus.

    Juliette est une enfant qui se cache dans un corps d'adulte, et un adulte qui se cache dans un corps d'enfant. Les deux à la fois, elle ne sait pas vraiment qui elle est, à l'intérieur comme à l'extérieur. Elle attache ses longs cheveux en deux couettes symétriques, comme une petite fille, mais elle noircit le contour de ses yeux avec du crayon, comme une femme. Son visage peut passer de la moue enfantine au sourire charmeur, d’un seul coup.
    Juliette porte des shorts très courts, même quand il fait froid. Trop peu de tissu sur son corps frêle, mais on lui a toujours appris à montrer son corps tel qu'il était, et c'est dur de faire comme si son passé n'avait jamais existé. Cependant, quand les regards recommencent à lui faire mal, elle ferme son grand manteau noir, comme un étau autour de son corps. Une coquille pour la protéger.

    Juliette, elle est rêveuse. Elle est souvent perdue dans ses pensées, silencieuse et calme comme un lac paisible. Elle observe tout, mais refuse d'être observée. Elle voudrait voir le monde d'en haut, n'être qu'une ombre sans vie, sans aucune particularité. C'est ce dont elle se persuade, Juliette, mais la vie a l'air si douce, sucrée comme les beignets à la framboise qu'on lui offrait parfois, après une journée de dur labeur... Juliette a toujours été ballottée d'un endroit à un autre, comme un objet, alors c'est difficile pour elle de se voir autrement que de cette manière-là. Un objet, ça va là où on lui demande d'aller, heureux de ne pas finir à la déchetterie. Alors Juliette met tout en œuvre pour que jamais, au grand jamais, on ne la jette à la poubelle.


III- 7, 8, 9, sort vite de ton œuf.

    Je m'en souviens encore...
    ... de ce coup de téléphone.


    Les cris, les rires, l’effervescence au bar, et la musique qui se déverse par litres dans les oreilles des jeunes et moins jeunes. Zigzagant entre les tables avec ses patins à roulettes, un carnet et un stylo à la main, une jeune femme souriait aux clients, réprimandant en riant ceux qui s’aventuraient à poser leur main sur son corps un peu trop dénudé. Elle regarda à l’extérieur, par l’immense baie vitrée qui d’ordinaire laissait passer la lumière du jour et illuminait le restaurant. Il pleuvait à verse, et il faisait nuit noire déjà. Elle était bien heureuse de ne pas faire le service à l’extérieur, bien qu’il n’y ait pas beaucoup de voitures qui se hasardait à passer commande par ce temps. Sa vie était ainsi, chaque jour avait son lot de chance et de déveine. Son quotidien passait inexorablement, dans les cuisines fumantes ou dans la salle bruyante, et elle ne pouvait rien faire pour l’arrêter.

    Puis, comme un bateau qui virerait de bord, son destin prit un tour différent. Au départ, elle n’entendit pas la sonnerie du téléphone dans les cuisines du restaurant, ce qui n’était pas étonnant vu le raffut environnant. Et puis, de toute façon, ce n’était pas à elle de répondre mais à la vieille Marie. La patronne, une bonne femme d’âge mûr, se faisait appeler "Marie" par les clients et le personnel, allez savoir pourquoi. Pourtant, ce n’était pas une sainte.

    Après s’être traînée jusqu’au téléphone et avoir lâché un "oui" de sa voix grave et abîmée par la cigarette, elle écouta son correspondant en plissant les sourcils, réflexe ridant son front et la faisant ressembler un peu plus que d’ordinaire à un bouledogue. Puis elle tira une bouffée de sa cigarette, laissant les volutes de fumée noyer le combiné et cria sèchement :

    « Kate ! Ramène tes fesses ! »

    Et elle repartit à ses comptes dans son bureau, ce à quoi elle passait le plus clair de son temps. La demoiselle, étonnée, s’approcha timidement du téléphone, comme si elle s’attendait à ce qu’il la morde. Elle sentait le regard des autres serveuses posé sur elle, présence intimidante. Jamais personne n’appelait au restaurant pour parler à une serveuse. Jamais.

    « ... Allô ? »

    ... de cette pluie battante.

    Kate soupira, frissonnante dans son uniforme trempé. Elle n’avait vraiment pas de chance. Pour une fois qu’elle pensait échapper à la pluie, il fallait qu’elle scrute les alentours pour trouver quelqu’un qu’elle n’avait pas revu depuis le lycée. Elle n’avait jamais eu de chance de toute façon, ce n’était pas maintenant que ça allait changer. Au moins, la vieille Marie l’avait laissée quitter son service un peu plus tôt, elle n’était peut-être pas si tyrannique que ça... Si elle devait passer le reste de sa vie dans ce restaurant, elle avait plutôt intérêt à faire plus ample connaissance. Oui, elle irait lui proposer de prendre un café un de ces jours. Elle croisa les bras sur sa poitrine, grelottant et maudissant le peu de tissu que comportait l’uniforme. Tout ça pour aguicher les clients... Mais ça marchait plutôt bien.

    « Kate ? C’est toi ? »

    Deux silhouettes face à elle. L’une, plus petite, restait légèrement en retrait, comme intimidée par les néons colorés de la vitrine. Celle qui avait parlé se révéla être la personne qu’elle attendait. Elle s’approcha avec un grand sourire, prenant ses mains glacées dans les siennes.

    « Jane ! Comme je suis heureuse de te revoir, ça fait quoi, huit ans ? Entre donc, tu vas attraper froid ! Et... »

    Elle se pencha vers la petite fille et resta un instant stupéfaite devant ses grands yeux bleus. Ils lui faisaient penser à la mer, bien qu’elle ne l’ai jamais vue. En tout cas, si elle avait dû la dessiner, elle aurait immanquablement choisit cette couleur. Mais elle dessinait comme un pied, alors la question ne se posait pas. Elle attendait que Jane fasse les présentations, mais elle semblait ailleurs. Elle avait toujours été un peu rêveuse, aussi ne s’en formalisa-t-elle pas. Elle les invita à la suivre en passant par la porte de service.

    ... de ces yeux hagards.

    Jane n’avait jamais aimé le café. Elle se forçait quand même lorsqu’on lui en servait, buvant la substance noire d’un seul trait même brûlante et assurant que c’était délicieux. Cependant, ce jour-là, elle resta muette devant la tasse blanche, fixant la surface du liquide d’un air absorbé. Elle savait que Kate la regardait. Elle lui devait des explications, mais elle n’arrivait pas à ouvrir la bouche. Elle la suppliait en silence de prendre la parole, ce qu’elle finit par faire.

    « Comment s’appelle-t-elle ? »

    Elle avait dit cela sur le ton de la discussion mais Jane sentit les reproches derrière les mots. Kate prit une gorgée de café. Oui, elle avait compris. Compris pourquoi sa meilleure amie avait fugué sans même lui dire adieu, il y avait huit ans de cela. On fait tous des erreurs.

    « Juliette. »

    « Juliet ? C’est un peu vieillot, tu trouves pas ? »

    « Non, Juliette. À la française. »

    Kate se tourna vers la porte derrière laquelle la petite fille dormait paisiblement. "Juliette". "À la française". Son amie avait toujours idéalisé la France. Femmes élégantes, Paris rayonnante, les chapeaux à plumes et la baguette de pain. Elle voulait s’installer là-bas et y vivre une vie palpitante, disait-elle avec des étoiles dans les yeux. Le temps change bien des choses... Elle ne savait pas pourquoi Jane s’était subitement souvenue d’elle et de la pension pour les serveuses située juste derrière le restaurant. Elles avaient l’air affamées, comme deux chiots abandonnés, elle ne pouvait pas les laisser à la rue.

    Elle ne prit pas la peine de lui demander qui était le père, elle ne le savait probablement pas. Elles avaient toutes deux, comme bien d’autres filles de leur âge, profité pleinement de leur jeunesse sans penser aux conséquences. Voilà où cela les avait mené : une rêveuse coincée dans un restaurant jusqu’à la fin de ses jours et une clocharde avec une petite fille sur les bras. Elle poussa un soupir avant de secouer vigoureusement la tête. Elle s’était promis de rester digne et sans regret en toutes circonstances ! Sans faire de bruit, elle se leva et aida son amie à marcher jusqu’à la chambre du fond et à s’installer sur le lit déglingué. Elle ne savait pas de quoi serait fait le lendemain, mais il faudrait faire face et prendre des décisions.

    « Bonne nuit... »

    ... de ce silence blessé.

    Partie, envolée. Lorsqu’elle avait ouvert la porte de la chambre ce matin, la fillette dormait toujours, roulée en boule sous les couvertures, et le lit de Jane était vide. Kate en laissa tomber le plateau qu’elle portait, les tasses en porcelaine se brisant dans un grand fracas sur le sol. La petite fille se réveilla en sursaut, regardant autour d’elle avec un air effrayé. Ses grands yeux écarquillés, la bouche entrouverte sous le coup de la confusion, elle fixa le lit où se trouvait sa mère le soir même. Sa gorge se serra lorsqu’elle comprit qu’elle ne la reverrait plus, mais elle ne pleura pas, trop choquée par la nouvelle. Lentement, elle prit les bords de sa couvertures pour la mettre par dessus sa tête. Se cacher, rester seule, tenter en vain de comprendre. La serveuse referma la porte derrière elle, le cœur battant à tout rompre. Et la première pensée qui lui traversa l’esprit fût : « Je vais devoir expliquer ça à ma patronne... »

    ... de ce compromis.

    « ... Elle est très jolie. »

    Une simple phrase, lâchée après un silence de plusieurs minutes. Une simple phrase qui alluma une lueur d’espoir dans les yeux de la petite fille de huit ans. Peut-être n’allait-elle pas être jetée à la rue comme une malpropre. La vieille Marie, après l’avoir longuement observée, se leva lentement, avec des gestes rendus douloureux par la vieillesse et la cigarette, et ordonna :

    « Lève-toi et tourne sur toi-même. »

    La fillette s’exécuta, un peu mal à l’aise. Elle avait l’impression d’être une bête de foire qu’on examine sous toutes les coutures avant de décider si on va l’acheter ou bien l’abandonner à son triste sort. Mais si ça lui permettait de survivre... Le regard perçant de la vieille défraîchie scrutait la moindre parcelle de son corps, de ses chevilles musclées par des heures d’errance à ses longs cheveux d’encre, en passant par son dos plutôt droit et ses yeux aussi profonds que les abysses. Elle ouvrit la bouche pour expirer la fumée de sa cigarette, prenant tout son temps, se délectant de l’anxiété de la petite brune. Enfin, elle lâcha sans un sourire, sans un signe amical :

    « T’es un peu frêle ma petite, va falloir changer ça. Tu peux rester dans la chambre où tu as dormi cette nuit. »

    Elle fit quelques pas vers la porte, la fillette ne réalisant pas encore qu’elle avait son accord, puis se tourna vers elle une dernière fois avant de passer le seuil et de disparaître derrière ses paperasses.

    « Je te préviens, ici on ne nourrit que ceux qui travaillent ! T’as intérêt à trimer, compris ? »

    Mais Juliette n’eût même pas le temps d’acquiescer, ni même de lui adresser un semblant de remerciement. Apparemment, elle n’en voulait pas. Kate sourit, soulagée de voir qu’au fond, sa patronne avait un cœur. Un cœur ravagé, un cœur rouillé et grinçant, mais un grand cœur quand même.

    « Allez, suis-moi, je vais te présenter aux filles. Tu commenceras ce soir, je te montrerai comment faire la plonge. »

    ... de cette petite voix résonnant dans la pièce.

    « Bon-Bonjour, je m’appelle Juliette. J’ai onze ans, à peu près, les filles disent que mon anniversaire c’est aujourd’hui mais en vrai personne sait quel jour je suis née. En avril en tout cas, ça c’est sûr. Les enfants qui viennent au restaurant disent que c’est bizarre mais moi je trouve pas. Alors je leur parle plus, ils m’énervent avec leurs manières. Mais bon, je vais bien être obligée de leur parler parce que, aujourd’hui, je commence à être serveuse. D’habitude je fais que la vaisselle, mais la vieille Marie veut que je fasse le service maintenant que je suis assez grande. Elle dit que je suis plutôt jolie et que ça serait du gâchis de pas en profiter. Moi j’aime pas trop ça, ya des monsieurs qui font que me regarder bizarr- »

    « Juliette ? »

    La fillette sursauta au son inattendu de cette voix et fit volte-face, un rictus apeuré au visage. Kate soupira en levant les yeux au ciel. Elle savait que la petite était spéciale, mais elle ne pensait pas au point de parler à son reflet ! Elle s’approcha de la coiffeuse et y posa l’uniforme dont elle venait de faire les retouches. Puis, les mains sur les hanches, elle inspecta le reflet de sa petite protégée dans le miroir.

    « Je pense qu’il devrait être à ta taille maintenant, c’est fou ce que tu peux être menue ! En même temps, pas étonnant vu ce que tu manges... Allez, dépêche-toi de l’enfiler, après on verra comment tu te débrouilles sur des roulettes. »

    La brunette acquiesça et se hâta d’obéir pendant que Kate regardait ailleurs. La pièce était assez sombre à cause de la couche de crasse qui recouvrait les vitres. Elles avaient bien tenté de les nettoyer une fois, mais c’était peine perdue, même avec la meilleure volonté du monde elles ne parvenaient pas à gratter plus d’un millimètre. Le lit était parfaitement fait, ainsi que le ménage, c’était un point sur lequel la vieille Marie ne plaisantait pas. Déjà qu’elle avait accepté d’héberger un gosse, fallait pas trop en demander non plus ! La chambre n’avait pas beaucoup changé depuis son arrivée. La coiffeuse avait été ajoutée un ou deux ans auparavant, sortant d’une braderie à laquelle la vieille Marie s’était battue bec et ongles pour l’obtenir pour une poignée de dollars. Dessus étaient éparpillés de petits objets, allant de produits de maquillage donnés par ses aînées aux jolies pierres trouvées sur le trottoir à l’avant du restaurant.

    « Euuuuh... Kate ? »

    « Hum ? »

    Arrachée à ses pensées, elle se tourna dans sa direction. La petite tirait nerveusement sur le bas de son uniforme, le visage écarlate. D’une toute petite voix, elle poursuivit :

    « Tu... Tu es sûre qu’il n’est pas trop petit ? »

    « Maiiiiis non, il est parfait. Et puis... »

    Elle ajusta le haut pour qu’il soit un peu plus décolleté et lui donna une tape sur les fesses en la poussant vers l’extérieur pour essayer les rollers.

    « .... c’est ton boulot maintenant ♥ »

    ... de cette crainte dans l’obscurité.

    Boum boum. Boum boum.
    Le cœur battant à tout rompre, les yeux écarquillés dans la nuit noire, la petite Juliette se cachait le plus loin possible sous sa couverture. Elle peinait à respirer mais jamais elle ne sortirait, têtue comme elle était. Elle murmurait des « je veux pas », des « je t’en supplie, fais pas ça » et des « noooon je serai gentille, juré ! » pour elle toute seule tandis qu’une ombre se rapprochait, intriguée par les tremblements de la couverture. Elle poussa un cri strident lorsqu’une main se posa sur son dos et l’arracha à sa cachette avant d’allumer la lumière.

    « NOOOOOOOOOOOON !! »

    Une main se plaqua sur sa bouche pour l’empêcher de hurler à la mort puis on murmura d’une voix sifflante :

    « Non mais ça va pas ?! Tu veux réveiller tout le quartier ma parole ! »

    « Je t’en supplie, ne fais pas ça ! »

    « Chut ! Mais de quoi tu parles ? »

    La pauvre Kate ne comprenait pas ce qui pouvait mettre la petite dans cet état. Elle la regardait d’un air horrifié, comme si elle était un monstre assoiffé de sang. Elle se retourna même pour vérifier qu’il n’y en avait pas un caché derrière elle. Le visage ruisselant de larmes et la morve au nez, elle finit par parvenir à ânonner un semblant d’explication à travers ses sanglots.

    « Me... me coupe pas... les cheveeeeeeux... »

    Soudain, elle se souvint. Dans l’après-midi, alors qu’elle venait de finir son service, elle avait croisé Juliette qui s’était pris les cheveux dans un tiroir et n’arrivait pas à les en tirer. Elle l’avait tout d’abord aidée avant de lui demander pourquoi elle ne les coupait pas, la mode était aux cheveux courts après tout. Elle avait alors attrapé ses couettes et s’était écriée « Ja-mais ! ». La jeune serveuse n’avait pût s’empêcher de la taquiner un peu en la menaçant de venir les couper pendant son sommeil. Elle n’aurait jamais pensé qu’elle la prendrait au mot... Elle lâcha dans un soupir exaspéré :

    « Juliette... Ce que tu peux être stupide parfois ! »

    ... de cette chanson dans le local à poubelles.

    « Aaaa... Béééé... Euuuuh... »

    « Non, pas E Juliette. Après B, c’est... ? »

    « ... J’ai oublié. »

    « Kate ! Retourne en salle, ya du monde ce soir ! Et toi Juliette, va sortir les poubelles ! »

    Dérangées dans leur leçon par la voix mélodieuse de leur patronne, les deux serveuses se regardèrent un instant dans les yeux. Et toutes deux soupirèrent bruyamment avant de retourner à leurs tâches respectives. Elles avaient compris à présent que ce n’était pas la peine d’espérer, la patronne ne laisserait jamais Juliette apprendre à lire et écrire. Perte de temps ! disait-elle, elle a une excellente mémoire, pas besoin de lui farcir la cervelle avec quelque chose qui ne lui servirait pas. Depuis le jour où elle les avait surprise en plein apprentissage des lettres, elle prenait un malin plaisir à les appeler dès que Juliette commençait à se concentrer.

    En enfilant ses vieilles chaussures trop petites pour elle, Juliette pensa tristement à ce monde aux symboles étranges qu’elle ne pourrait jamais explorer... Elle ferma son long manteau noir et attrapa deux des sacs poubelle qui s’entassaient à côté de la porte de service. Elle se contorsionna pour ouvrir la poignée avec son pied et sortit. Il faisait nuit dehors, la lumière grésillant au dessus de la porte n’éclairait même pas jusqu’aux poubelles et on entendait la musique et les rires en fond sonore. Le vent s’engouffra dans ses cheveux, la faisant frissonner. Pour se donner du courage, elle commença à chanter en avançant dans la pénombre.

    « Laissez parler
    Les p'tits papiers
    A l'occasion
    Papier chiffon
    Puissent-ils un soir
    Papier buvard
    Vous consoler. »


    Elle déposa les sacs dans la gueule béante de la poubelle, la voix tremblante. Si la vieille Marie la voyait, elle se moquerait bien d’elle. Elle dirait « Mais c’est quoi, cette gamine de bientôt treize ans qu’a encore peur du noir ! Tu vas pas mouiller tes draps non plus ?! ». C’était injuste, ça faisait bien longtemps qu’elle avait arrêté... Ce n’était pas de sa faute si le noir l’effrayait autant ! Un chat errant passa juste devant son nez, elle ne pût s’empêcher de reculer brusquement et se prit les pieds dans un couvercle de poubelle.

    « Ah ! »

    Elle se retrouva les quatre fers en l’air, assise entre des arêtes de poisson et une flaque d’un liquide plus que suspect. Elle fit la grimace et se redressa en se frottant le bas du dos. Si elle se retrouvait avec un bleu, la vieille Marie allait la sermonner.

    « Euh... Tu vas bien ? »

    Crise cardiaque. Une ombre se rapprochait d’elle, hésitante mais terriblement effrayante pour la petite fille. Elle n’arrivait même plus à crier, tout tremblait autour d’elle. Elle ferma les yeux, portant ses bras devant son visage pour se protéger.

    « Tout va bien, je ne vais pas te faire de mal tu sais ? »

    Elle ouvrit un œil et dévisagea l’inconnue qui se trouvait devant elle. C’était juste une fille, elle devait avoir à peu près son âge d’après ce qu’elle pouvait estimer avec la faible lueur du néon. Celle-ci se rapprocha encore un peu, dévoila des cheveux blonds et ondulés, ainsi qu’une paire d’yeux noisettes qui coupèrent le souffle de la petite serveuse. Ce ne fit qu’empirer lorsque l’apparition posa sa main sur son bras écorché.

    « Ouille... Tu es sacrément mal tombée... Il ne faudra pas oublier de désinfecter, hein ? »

    Le cerveau pédalant dans le vide, elle hocha vaguement de la tête. Puis une voix de femme se fit entendre, et l’apparition s’en alla en lui disant au revoir. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’elle fût capable de reprendre sa respiration, comme si elle sortait de l’eau après être restée en apnée. Elle respira cette légère odeur qui flottait dans l’air, entre celles de poubelle et de divers objets en décomposition. Un odeur de parfum qui lui rappelait deux yeux noisettes perdus dans la nuit noire.

    ... de cette discussion avec une habituée.

    Juliette était de service ce soir. Elle slalomait avec aisance entre les tables avec ses patins, parfois les bras encombrés de plus de plateau qu’elle n’aurait pu en compter. Elle n’avait pas revu la petite fille blonde depuis cette nuit des poubelles, pourtant ce n’était pas faute d’arpenter la salle des yeux tout au long de la journée. Entre deux commandes, elle lâcha un profond soupir. Peut-être ne la reverrait-elle jamais...

    « Ben alors Juliette, t’as pas le moral ? »

    Elle tourna la tête vers la personne qui l’avait interpellée et s’approcha d’elle en quelques glissades. C’était une habituée du restaurant, Vivian, une jeune femme trop maquillée qui portait en permanence une perruque blonde coupée au carré et les mêmes vêtements aguicheurs rafistolés comme elle pouvait. Allez savoir pourquoi, la vieille Marie ne l’aimait pas beaucoup.

    « Allez, raconte-moi tout, tu as un chagrin d’amour ? »

    « Juliette ! Retourne bosser immédiatement ! »

    Tiraillée entre deux ordres contraires, Juliette hésita un instant. La voix de la patronne ne laissait aucun doute possible, si elle refusait elle dormirait dehors, mais on lui répétait sans cesse de ne pas contredire les clients... Au final, le beuglement de Vivian trancha la question.

    « Je lui PARLE Marie !! Fous-lui la paix trente secondes, j’te la rends après ! »

    La vieille Marie grommela quelque chose d’incompréhensible, mais elle comprit qu’elle avait sa permission. Pour quelques instants en tout cas. Heureuse de cette pause avant l’heure, elle s’assit sur le tabouret haut perché que lui présentait la fille des rues.

    « Alors ma p’tite ! Faut pas se laisser avoir par l’amour, tu sais ? De toute façon, ça mène à rien, sauf à la souffrance. C’est pour ça que j’embrasse jamais mes clients sur la bouche, faut jamais mélanger le travail et les sentiments. »

    La petite brune hocha la tête, très attentive. Elle aimait bien Vivian. Elle avait beaucoup souffert dans sa vie, ça se voyait, mais elle restait forte et inébranlable. Une fois, quand elle était plus jeune, elle lui avait demandé pourquoi elle portait une perruque. Elle s’était exclamée que c’était ses vrais cheveux, non de non ! Mais juste avant de partir, à l’heure de la fermeture, elle lui avait confié son secret dans le creux de l’oreille. En dessous de sa perruque blonde soit-disant à la mode, se cachait une chevelure rousse que beaucoup considéraient comme la marque du Diable. Dans ses débuts, on lui avait même arraché quelques mèches pour cela. Les gens sont des idiots, avait-elle ajouté.

    « Ne fais pas les mêmes erreurs que moi, d’accord Juliette ? »

    Dans ses yeux à la couleur indéfinissable, Juliette lisait une grande tristesse, une tristesse cachée derrière sa carapace de discours inflexibles. Pourtant, malgré tous ses conseils, toutes ces mises en garde, Juliette voulait connaître ce sentiment qui unissait les familles venant parfois au restaurant le samedi soir. Ils avaient l’air tellement heureux...

    « Promis. »

    ... de ce sentiment qui grandissait en cachette.

    Elle l’avait revue. Elle se sentait tellement heureuse, comme lorsqu’on attend un cadeau désespérément, qu’on finit par abandonner et qu’on le trouve le lendemain devant le porche. La fille aux yeux noisettes. Lorsqu’elle l’avait vue arriver dans la salle avec sa mère, elle en avait fait tomber le plateau qu’elle portait. Heureusement, il était presque vide, mais ça n’avait pas empêcher la vieille Marie de lui administrer l’engueulade du siècle.

    Elle lui avait parlé. Elle venait un peu chaque jour, pendant ses pauses, rien que pour elle. Elle disait que sa vie la fascinait. Elle aurait tant voulu être indépendante, comme elle. Juliette ne comprenait pas vraiment ce qu’elle voulait dire, mais elle disait le contraire. Elle ne voulait pas contredire sa nouvelle amie. Elle avait tellement peur qu’elle parte fâchée et qu’elle ne revienne jamais... Lorsque ses yeux brillaient, c’était comme un rayon de soleil qui illuminait doucement son petit monde.

    Et puis il arriva, ce dimanche où elle ne travaillait pas. Ce dimanche où elle lui proposa de venir chez elle, pour qu’elle aussi découvre son univers. Elle avait finit par accepter, un peu intimidée. Elle avait franchi le seuil de sa grande maison de style européen, visité chacune des immenses pièces qu’elle contenait pour enfin arriver dans sa chambre. C’était une salle lumineuse, entièrement dans les tons rose et blanc cassé. Elle avait vu sa maison de poupée qui ressemblait à s’y méprendre à une miniature de son domicile. La fille aux yeux noisettes lui passa un bracelet en dentelle blanche autour du poignet. Elle avait pénétré un monde inconnu pour elle, ce qu’elle aurait vécu si elle était née dans une famille normale. Un univers souriant et coloré. Elle se sentait étrangère. Et elle n’avait pas tord.

    Après quelques minutes passées dans cette chambre pour petite fille de bonne famille, sa mère débarqua comme une furie et elle en fût chassée. Mais qu’est-ce que tu fais ici toi, bonne à rien, fille des rues, clocharde, sors d’ici immédiatement, enfin, on a pas idée de faire rentrer des inconnus ! Si elle n’avait pas couru pour s’enfuir tant elle était effrayée, elle aurait été refoulée à coups de balais dans le dos.

    Elle ne s’arrêta de courir qu’une fois arrivée à quelques mètres du restaurant. Elle s’appuya contre un mur en briques pour reprendre son souffle, épuisée. Et puis, sans pouvoir les retenir, les larmes se mirent à couler de ses yeux bleus océan. Une plainte s’échappa de ses lèvres, son menton tremblait tandis que sa poitrine était agitée de soubresauts. Elle pleurait parce qu’elle avait eu peur. Elle pleurait parce qu’elle avait du mal à respirer. Elle pleurait parce qu’elle avait vraiment l’impression d’être nulle, une bonne à rien, une fille de chien. Elle pleurait parce qu’elle savait qu’elle ne la reverrait jamais, la petite fille aux yeux noisettes. Comment s’appelait-elle déjà ? Elle respira l’odeur du bracelet toujours à son poignet, triste consolation, unique souvenir de son premier amour. Vivian avait sûrement raison, la vie c’est pas brillant.

    ... de cette disparition.

    Des éclats de voix montaient des cuisines, à peine couverts par les discussions des clients en salle. Au milieu de la bataille, Juliette se taisait, comme dans un état second.

    « Qu’est-ce que j’y peux moi ?! Comment j’aurais pu savoir ?! »

    « C’était ton amie ! Elle aurait pu t’en parler au moins !! »

    « M’en parler ?! Mais bien sûr, autant me dire "Je compte abandonner ma fille au fait, pensez à la faire recenser" !! »

    « C’est ainsi, pour le gouvernement cette petite n’existe pas. »

    La dispute se poursuivait, mais la petite brune ne suivait plus. Elle n’existait pas ? Mais alors, toute sa vie n’était qu’un mensonge ? Elle n’était pas comme les autres, ça elle le savait. Les garçons et les filles de son âge la regardaient bizarrement. Depuis qu’elle était arrivée ici, ils ne cessaient de lui poser des questions qu’elle jugeait indiscrètes et même stupides. Pourquoi tu vas pas à l’école ? Pourquoi tu travailles déjà ? Pourquoi tu connais pas ton anniversaire ? Elle est où ta maman ? Pourquoi tu parles pas ? Pourquoi tu joues pas ? Elle avait sa réponse maintenant. Elle n’était qu’une ombre, une silhouette en papier sans existence propre. Jamais elle ne pourrait vivre vraiment.

    « Juliette ? »

    La porte de service avait claqué violemment à cause du vent qui soufflait à l’extérieur. Il faisait froid aussi, et il pleuvait à verse. Malgré tout, Juliette était sortie. Et lorsque Kate et la vieille Marie se jetèrent dehors pour la chercher et lui expliquer que ça allait s’arranger, Juliette avait disparu. Comme une écume dans l’Océan, celle qui n’existait pas s’était évanouie, laissant derrière elle un vide bien trop important pour quelqu’un dont la vie n’était rien.

    ... de cette mer de sentiments.

    Quand elle avait ouvert la porte, elle était tombée dans la mer. Une eau sombre qui engourdissait ses mouvements et faisait flotter ses cheveux tout autour d’elle. Quelques bulles s’échappèrent de ses lèvres, la faisant paniquer. Elle allait mourir noyée ? Dans un local à poubelles ?! Heureusement, elle se rendit compte qu’elle pouvait respirer. Un peu comme dans un rêve. Soudain, dans le noir de ses pensées, une lueur apparut. Une petite fille dans un fauteuil roulant, qui tenait des crayons de couleur.

    « Bonjour petite couleur perdue… Astrid est là, Astrid est venue te sauver, n’aie plus peur… Astrid est seule aussi, veux-tu jouer avec Astrid ? »

    Les crayons tombèrent sur le sol, les uns après les autres. Elle se sentait comme hypnotisée. Elle était venue la sauver ? Elle allait pouvoir exister, elle aussi ? Vivre, comme les autre ? D’une voix pleine d’un espoir hésitant, elle murmura :

    « D’a-d’accord... Aide-moi, s’il te plaît... »

    La petite fille en fauteuil roulant lui sourit doucement, et elle crût qu’elle allait se mettre à pleurer. Tant de personnes lui avaient souri, et ce n’était que maintenant qu’elle s’en rendait compte ! Kate et les autres serveuses, même la vieille Marie un jour, Vivian, le peintre qui lui demandait tout le temps si elle voulait bien poser pour lui, mais elle avait bien trop peur pour cela, et puis la petite fille aux yeux noisettes, évidemment. Elle ferma les yeux, se laissant bercer par la mélodie qui s’échappait des lèvres d’Astrid.

    « Astrid choisit une couleur, Astrid choisit une couleur !
    De quelle couleur va-t-elle te peindre ?
    Elle va te peindre en ROUGE !
    Rouge passion, rouge colère…
    Elle va te peindre en ORANGE !
    Orange, centre de l’univers…
    Elle va te peindre en JAUNE !
    Tu seras heureux à jamais…
    Elle va te peindre en VERT !
    Vert, la chance te guidera mais…
    Elle va te peindre en BLEU !
    Peur dans les plaines abyssales…
    Elle va te peindre en VIOLET !
    Tes souvenirs te feront mal…
    Elle va te peindre en INDIGO !
    Ta folie tu ne pourras que craindre…
    De quelle couleur va-t-elle te peindre ? »



IV- 1, 2, 3, qui est derrière toi ?

    Pseudo : Léa-chii
    Comment avez-vous trouvé ce forum ? Tout à fait par hasard, en soulevant un caillou.
    Avez-vous des suggestions pour l’améliorer ? Virez Astrid ! *pan*
    Avez-vous des remarques à faire ? Le roi, c'est moi.
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Astrid Age : 30
Humeur : Changeante.

Astrid


Juliette { My American Graffiti Empty
message posté le Sam 10 Mar 2012 - 16:41 dans Re: Juliette { My American Graffiti
• • • •
« Petite couleur craintive voulant trouver sa place dans un monde sans pitié, Astrid va te peindre en BLEU
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Juliette Age : 30

Juliette


Juliette { My American Graffiti Empty
message posté le Sam 10 Mar 2012 - 16:43 dans Re: Juliette { My American Graffiti
• • • •

    Son lit était dur. Il avait toujours été dur, mais là c’était trop pour son dos. Elle se redressa en grimaçant, se frotta les yeux puis se rendit compte qu’elle était à l’extérieur. Cette nouvelle l’alarma, où se trouvait-elle au juste ? Elle regarda tout autour d’elle, bouleversée. Le soleil était haut dans le ciel et éclairait un paysage qu’elle n’aurait jamais crût voir un jour. Elle se rallongea un instant sur le cercle bleu au sol, tentant de remettre de l’ordre dans ses pensées. Elle avait rencontré cette petite fille, Astrid. Elle avait accepté de jouer avec elle.

    Elle allait pouvoir vivre. Était-ce pour cela qu’elle se retrouvait dans ce monde ? Pour enfin avoir une existence à elle ? Elle se redressa en souriant, toute excitée à cette idée. Bon, elle avait un peu la flippe aussi. Mais on ne changeait pas Juliette, la petite peureuse...

    Elle commença à marcher, ses pieds butant parfois contre les dalles un peu plus hautes que les autres de ces étranges ruines. Bientôt, les dalles laissèrent place à l’herbe et elle sentit son cœur s’envoler. Elle n’avait jamais vu ça. De l’herbe, comme dans les séries qu’elle pouvait parfois regarder dans les vitrines des magasins de télévision. Elle ne put résister à la tentation d’ôter ses chaussures trop petites et faillit se mettre à sautiller comme une gamine. Cependant, elle était toujours sur ses gardes. Peut-être qu’un monstre plat était là, à l’attendre tapis dans l’herbe... Elle frissonna et poursuivit son chemin à un rythme un peu plus soutenu.

    Elle arriva en bordure d’un lac scintillant. Elle s’en approcha prudemment et se pencha au dessus, bien à l’abri sur une plaque rocheuse qui ne manquerait pas de s’écrouler (elle avait vérifié en sautant dessus, au cas où). C’est à ce moment-là qu’elle se rendit compte qu’il y avait quelque chose d’étrange sur son visage. Ou plutôt, au niveau de son œil gauche. Il semblait légèrement plus clair que l’autre, et brillait comme s’il y avait une flamme à l’intérieur. Intriguée, elle s’approcha un peu plus près. En effet, il y avait un symbole gravé dans son œil, mais elle ne parvenait pas à en distinguer les contours... Une flamme ? Une lune ?

    Sans qu’elle ait le temps de se poser plus de questions, son corps bascula en avant et elle tomba la tête la première dans le lac, troublant sa surface d’une multitude de vaguelettes. Elle en sortit aussitôt, criant comme une possédée et se recroquevilla sur elle-même pour se calmer. Ce n’était que de l’eau. Juste de l’eau.

    Juliette avait encore du chemin à faire.
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Iris Age : 27
Humeur : Je veux du chocolat ♥

Iris


Juliette { My American Graffiti Empty
message posté le Dim 11 Mar 2012 - 11:16 dans Re: Juliette { My American Graffiti
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KRR KRR KRR KRR. Que dire à part que c'est parfait, que tu es bête de ne pas t'être validée, que cette fiche est OMG tellement bien, que sa disparition est juste horrible et que je veux Juliette en version peluche ? Nothing.

Ah, si quand même : validée bleu darlin'. 8D
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message posté le dans Re: Juliette { My American Graffiti
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Juliette { My American Graffiti
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